24 octobre 2000 au Corum de Montpellier par Musicatreize dir Roland Hayrabedian piano solo : Jean-Claude Pennetier
1999 - Une cloche de feu rose dans les nuages 16 mn Ed. Mus. Européennes
pour piano solo et 11 voix ( commande de Musicatreize )
Création le 24 octobre 2000 au Corum de Montpellier par l'Ensemble Musicatreize, sous la direction de Roland Hayrabedian; piano solo Jean-Claude Pennetier.
Préface de l'auteur
Cette sonore, lumineuse phrase de Rimbaud, prise dans les Illuminations , constitue le point
de départ de la composition, sur les plans tant formel qu'acoustique.
Il s'agit d'une sorte de concerto pour piano et orchestre de voix.
La phrase-titre serait un alexandrin si l'on comptait tous les E muets ( sauf nuages... );
Mais le lecteur moderne ou pressé pourra réduire à 9 pieds en omettant ces fameux E muets...
Pour ma part, j'ai raccourci seulement les "cloch'" , ici objet principal de recherche .
Donc, " une cloch' de feu rose dans les nuag'" ( en souligné les 2 accents probables en Français )
comporte 11 pieds, ou "hendécasyllabe".
Le nom du commanditaire, Roland HAYRABÉDIAN, comporte onze lettres, qui se traduisent,
au travers d'un alphabet personnel en 1/4 de tons , en un thème de 11 sons
Par ailleurs, les côtés et diagonales diverses du polygone régulier de 11 côtés - le très rare
hendécagone - , que l'on peut observer dans une seule église de France ( une rosace à Précy
sur Oise ), sert à former une "hendécacloche" parfaitement symétrique, simplement par projection
de ces dimensions; l'oeuvre se déroule alors en 11 séquences enchaînées:
Brève analyse:
I- ( 34") rapide introduction de la phrase sur une note parlando ( si = H ), scandée et mélée
de murmures
II- ( 1' 5" ) lent rituel où le piano fait sonner ses deux notes (HA = si-la ) comme des gongs
mystérieux... des phrases "dérivées" apparaissent et disparaissent
III- ( 1' 31" ) la phrase, rythmée sur 2 notes, est interrompue par des éclats virtuoses du piano:
pire, elle subit une érosion progressive à chaque énoncé, et termine bouche fermée...
IV- ( 1' 49" ) sons de cloches ( 3 mezzos en sonnerie sur 3 notes ), tintement des cordes aigues
du piano mélées aux accords-cloches très souvent basés sur la septième majeure ( 11 demi-tons);
l'orchestre se fait de plus en plus instrumental, et les mots de Rimbaud se muent peu à peu en un
simple matériau acoustique
V- ( 1' 58" ) toccata percussive basée sur un conflit rythmique entre 11 et 12 temps; puis la phrase
réapparaît dans un ostinato où elle tournoye sur elle-même
VI- ( 2' ) l'axe de symétrie de l'oeuvre: 11 variations pianistiques sur les 11 lettres du thème, de
plus en plus complexes harmoniquement, mais d'une pulsation implacablement règulière ;
l'orchestre ponctue et prolonge un jeu d'alexandrins en déformation successive que se lancent,
comme un concours d'improvisation, les 11 chanteurs.. ce qui peut nous mener jusqu'à
" dans le vieux clocher gris, vitrail à onze flammes..." ou encore:
"un flamillon.. carmin.. sur rocher... vermillon"
VII- ( 1' 58" ) furieuse cadence du piano, utilisant les vieux "agresseurs" de l'auteur ( clusters
avec avant-bras, paumes, poings ou tranchants de la main... ); des harmonies centrées sur si
sont cependant gardées dans la 3ème pédale; puis l'orchestre, enthousiaste, acclame le soliste
avant de scander par les mains ou la bouche la pulsation de la cadence
VIII- ( 1' 49" ) le piano se repose: grande nappes de sons chantés lentement glissés, à l'instrumentation
changeante, tour à tour vibrés ou non, trillés, nasals., murmurés, etc.. deux claves passent de main en main
en lançant des bribes mystérieuses de morse...
IX- ( 1' 31" ) rythme funèbre ( retour du rituel ) sur une percussion grave; balancement de cloches
arpégées, égrenées ou décomposées ( modèles analysés sur ordinateur et adaptés ici pour les
voix ou le piano, avec approximation au 1/4 ou au 1/2 ton )
X- ( 1' 5" ) cloches vocales plus espacées, et rythmiquement recomposées ( attaques synchrones )
le piano , pendant ce temps, voyage librement dans un hendécagone de cloches...
XI- ( 34" ) Conclusion sur un accord de onze sons , avec onze tempi et les onze syllabes superposées....
la note si ( H ) reste seule dans l'espace... le rêve s'éloigne, mystérieux, comme Rimbaud.